J'entends montrer qu'en matière d'usages livresques comme dans d'autres domaines, les utopistes du tournant XVIIe-XVIIIe siècle oscillent entre reproduction du connu, renversement du connu et invention du nouveau.
Que l'on considère les livres utilisés par les voyageurs, les livres écrits par eux et réécrits par leurs éditeurs, ou bien les livres étrangers en terres d'utopie, ou encore les rares et précieux livres rédigés par les utopiens, cet ensemble disparate interroge le rapport entre livres mêmes et livres autres, ainsi que la constitution de bibliothèques imaginaires : celle (religieuse ou romanesque) des Européens, fantasmée par les utopiens comme une sorte d'Enfer à interdire, et celles, mémorielles, légendaires, institutionnelles scientifiques ou magiques créées par les utopiens.